Dr John Joanisse : une carrière basée sur la curiosité et l’interdisciplinarité

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Photo Dr Joannisse
Source : hopitalmontfort.com

Né à Ottawa d’une mère irlandaise et d’un père francophone (mais qui a grandi aux États-Unis), Dr John Joanisse a rapidement compris l’importance de la langue dans le traitement des patients. Élevé dans un environnement anglophone, il est tout de même allé à l’école francophone. Sa maîtrise du français est impeccable.

L’interdisciplinarité d’une carrière

L’expérience médicale de Dr John Joanisse est vaste parce que, comme il le souligne, tout est intéressant.

La curiosité a été omniprésente dans sa pratique.

Malgré une ouverture pour faire sa résidence en pédiatrie, il a préféré se diriger vers la médecine familiale « pour la variété » que ça présentait. Comme son objectif était d’aller établir sa pratique en région, loin des grands centres urbains, il a donc taillé sa résidence sur mesure, afin d’acquérir le plus de connaissances possible à l’urgence, en obstétrique et en pédiatrie. Il serait ainsi en mesure de répondre aux besoins particuliers de sa clientèle.

Photo prise sur le site de la Ville de Kapuskasing.

Il quitte Edmonton pour établir sa pratique à Kapuskasing, un petit village francophone au nord-ouest de l’Ontario. Au cours des 14 années qui suivent, il se découvre un amour sincère pour la médecine familiale… qui se confirmera encore davantage à la suite d’une année passée à l’hôpital Sacré-Cœur de Hull (maintenant Gatineau). En effet, les enfants vieillissent et la famille décide de revenir dans la région ottavienne.

À Hull, il travaille comme urgentologue. Les défis sont nombreux et intéressants, mais le contact privilégié qu’il a développé avec ses patients lui manque.

Un médecin de Cumberland, établi depuis 1961, prend sa retraite au même moment, ce qui permet à Dr Joanisse de reprendre la clinique de Cumberland en 1987, tout en travaillant dans l’équipe de médecine familiale de Montfort. La clientèle de sa nouvelle clinique est plus âgée que celle qu’il voyait à Kapuskasing et nécessite une approche différente. Il s’allie les services d’une infirmière praticienne, avec qui il travaille en étroite collaboration. Les deux sont en mesure de mieux répondre aux besoins complexes d’une clientèle vieillissante.

Bien sûr, qui dit population vieillissante, dit moins d’accouchements. Dr Joanisse délaisse donc peu à peu l’obstétrique. Loin de voir ce changement comme une perte, il saisit plutôt cette opportunité pour ouvrir encore une fois ses horizons et « s’infiltre » au bloc opératoire, comme assistant en orthopédie, en chirurgie générale, en ORL et lors de chirurgies gynécologiques. Il passe alors presque trois journées par semaine au bloc.

En 1994, il doit réduire ses activités au bloc lorsqu’il devient médecin-chef. Il continue malgré tout à assister des chirurgiens lors de leurs procédures et à faire de l’admission.

Ses années comme médecin-chef sont, pour ainsi dire… occupées. En plus de ses fonctions administratives à Montfort, il poursuit sa pratique à Cumberland et travaille en soins de longue durée pour une résidence de personnes âgées, la Résidence Saint-Louis.

Cette période aura été haute en couleur et en défis. Non seulement pour les différentes activités qui remplissent son horaire, mais aussi avec la décision du gouvernement de l’époque qui tente de fermer l’hôpital.

Dr John Joanisse n’était pas et ne s’était jamais perçu comme un leader politique. En fait, lors de son embauche comme médecin-chef, il a pris soin de signaler à la direction qu’il n’était pas un « Pierre Trudeau » et qu’on ne pouvait pas s’attendre à ce qu’il soit charismatique.
Mais il se retrouvait malgré lui dans une situation où il devrait assumer ce genre de leadership. « Jamais, de ma vie, je pensais être pris dans une telle situation » dit-il.
« J’ai dit à Simone (son épouse) que c’était peut-être la chose la plus importante que je devrais faire dans ma vie. J’ai le privilège de défendre un peuple. »
Extrait du livre « Montfort, la lutte d’un peuple », par Michel Gratton.

On s’est débattu avec l’appui important du personnel et de la communauté franco-ontarienne, et franco-canadienne, et on a réussi à prendre une fermeture et à en faire quelque chose de beaucoup plus beau.

Montfort, une vocation universitaire

Montfort a été reconnu comme hôpital universitaire en juin 2013, mais sa vocation éducative date de bien avant cette reconnaissance officielle. Ce volet « enseignement en français » de la médecine et des sciences de la santé a d’ailleurs pesé lourd dans la balance lorsque Montfort s’est battu pour demeurer ouvert.

Durant son mandat de médecin-chef, Dr Joanisse prend des résidents en médecine familiale. Il considère que l’uniformisation de la formation des médecins, tout comme des autres professions médicales, est nécessaire pour assurer la qualité des soins offerts aux patients. Tous les médecins qui travaillent à Montfort ont le devoir d’enseigner, de transmettre leurs connaissances à la relève. C’est d’ailleurs durant son mandat de médecin-chef qu’il met en place ce programme. Après ses six ans comme médecin-chef, il devient VP des affaires académiques (le précurseur des Affaires universitaires de l’hôpital).

Bien qu’embryonnaire à l’époque, le programme d’enseignement en français offert à Montfort revêt une importance majeure. Il confère son caractère unique à l’hôpital et représente un véritable attrait pour les étudiants qui y voit une chance de travailler en français.

La découverte de nouvelles passions

Dr John Joanisse en tournage pour un documentaire au sujet de l’Hôpital Montfort qui a été présenté au Musée canadien des droits de la personne de Winnipeg.

Durant le tumulte de SOS Montfort, 21 nouveaux lits ont été ouverts en réadaptation à court terme. Aucun physiatre d’expérience ne travaillait à Montfort à cette époque.

Voyant une nouvelle opportunité, Dr Joanisse saisit la chance de se développer en réadaptation et en gériatrie, un domaine qui l’intéresse de plus en plus. Il prend aussi la direction médicale de la Résidence Saint-Louis à la même époque.

Il ne fait aucun doute, Dr Joanisse aime les défis et sa curiosité l’a amené à s’intéresser à la médecine sous différents angles. Depuis quelques années, il consacre son temps à la gériatrie, l’orthogériatrie et la réadaptation. Pour lui, les patients âgés représentent un défi, non seulement lorsqu’ils se fracturent un membre, mais aussi avec leur historique médical et leur environnement social plus complexes.

Il prône depuis longtemps l’utilisation d’équipes multidisciplinaires pour s’assurer d’avoir une vision holistique du patient et ainsi répondre adéquatement à ses besoins. Il participe par ailleurs à une étude menée à l’ISM sur l’enseignement de l’interdisciplinarité à Montfort.

Bien que Dr Joanisse prépare tranquillement sa retraite, il participe à un projet international de recherche mené par Baycrest. Avec le vieillissement de la population, il importe d’intéresser la relève aux défis spécifiques de cette population. Bien conscient que le curriculum des étudiants en médecine est déjà bien rempli, il participe au développement d’une boîte à outils pour les médecins qui travaillent en soins longue durée.

Grâce à une carrière qu’il qualifie lui-même « d’éparpillée », Dr John Joanisse a marqué le monde de la médecine. Que ce soit dans sa compréhension de la complexité des besoins de certains patients, de sa vision avant-gardiste de l’interdisciplinarité de la médecine ou de son respect pour les aptitudes et les compétences des autres professions, nul doute qu’il a marqué ses collègues et ses patients.

L’importance de bien s’entourer…

Il y a quelques années, alors qu’il courait un 10 km durant la fin de semaine de course d’Ottawa, il court avec un petit groupe de personnes qu’il connaît plus ou moins. Vers la fin de leur parcours, ils remarquent un homme étendu sur l’herbe, apparemment sans signes vitaux. Lui est médecin; la femme qui court à ses côtés, paramédic. Bien sûr, il connaît les techniques de réanimation; quant à elle, non seulement elle les connaît, mais elle doit les mettre en pratique sur une base quotidienne. Ses aptitudes de première répondante la rendaient plus à même de sauver la vie… ce qu’elle a fait!

Morale : lorsque vous vieillissez, si vous courez, faites-le aux côtés d’un.e paramédic!

Non, plus sérieusement, la morale de cette histoire est qu’il faut savoir reconnaître les aptitudes de chacun et savoir bien s’entourer.

Julie Marinier-Desjardins
Julie est conseillère pour l’équipe des communications à Montfort depuis juin 2019. Lorsqu’elle a du temps libre (ce qui est assez rare), elle aime parfaire ses compétences culinaires, courir (parfois pour rattraper le temps perdu) et voyager.