Carolyn Crowley fait partie de l’équipe Montfort depuis plus de 10 ans. Infirmière de formation, plusieurs l’ont connue comme gestionnaire au Centre familial de naissance, ou encore comme directrice clinique au cours des dernières années.

Depuis l’automne dernier, Carolyn est vice-présidente associée, soins aux patients et responsabilité sociale – un nouveau rôle qui a notamment comme objectif de faire en sorte que Montfort ait un impact positif pour les communautés que nous desservons.

Parmi les responsabilités de Carolyn, elle s’assure que l’hôpital remplisse ses obligations d’améliorer la santé et la sécurité culturelle des personnes autochtones dans notre région. C’est d’ailleurs spécifié dans notre entente de responsabilisation avec Santé Ontario.

À l’occasion du Mois national de l’histoire autochtone, Carolyn propose de répondre à trois questions sur le sujet. 

Pourquoi avons-nous une approche distincte envers la population autochtone ? Ces communautés ne sont-elles pas incluses dans nos efforts d’antiracisme, d’équité, diversité et inclusion (AR&EDI) ? 

« Les peuples autochtones au Canada ont subi des siècles de colonisation, d’expropriation de leurs territoires, de politiques d’assimilation forcée, ainsi que d’actes de violence », explique Carolyn. « Ces stratégies, qui étaient souvent légiférées par le gouvernement, avaient pour but l’élimination totale des peuples autochtones au Canada. »

« Le Canada a signé de nombreux traités avec les nations autochtones, créant des obligations légales et morales spécifiques envers ces communautés. Il ne faut pas oublier que ces traités reconnaissent les droits des peuples autochtones à leurs territoires, à leurs ressources et à leur autonomie gouvernementale. Ces droits ont rarement été respectés. »

« Honorer ces traités et s’engager dans des processus de réconciliation pour les actes haineux contre les peuples autochtones nécessite des mesures spécifiques qui sont différentes des stratégies de diversité et inclusion. Tandis que nous devons adresser le racisme contre les autochtones, tout comme nous devons éliminer le racisme contre des groupes culturels au Canada, ces peuples se distinguent puisqu’ils sont reconnus par la Constitution canadienne avec des droits ancestraux. »

Que faisons-nous à Montfort pour améliorer la sécurité culturelle autochtone ? 

« Notre priorité dans la prochaine année est de remettre en place la formation sur la sécurité culturelle autochtone pour l’ensemble du personnel », avance Carolyn. « La formation que nous avons choisie est une formation de base en ligne de 3,5 heures. Notre plan est de la déployer par étapes dans les différents secteurs de l’hôpital. Ce sera le début d’une sensibilisation ayant pour but de mettre à niveau les connaissances de tous les membres du personnel par l’entremise d’un apprentissage transformateur, aux bénéfices de nos patients autochtones. » 

« Je vous rappelle aussi que nous avons une politique de purification sacrée par la fumée (smudging) pour l’hôpital », ajoute Carolyn, « et je vous encourage à la consulter au Portail Montfort pour être mieux outillé à l’offrir aux patients lorsque c’est approprié. »

« En termes d’initiatives spécifiques à différents secteurs, le Centre familial de naissance travaille avec le Centre Wabano pour la santé autochtone pour implanter un processus plus culturellement approprié pour les dossiers d’aide à l’enfance », dit Carolyn. « L’imagerie médicale travaille à continuer d’offrir des cliniques de mammographie spécifiquement pour des groupes de personnes autochtones, et le bloc opératoire travaille à optimiser le cheminement des patients qui viennent du Nunavut pour des chirurgies orthopédiques. »

« Il y a peut-être des secteurs que j’ai omis ! Si c’est le cas, je vous invite à me faire part de vos initiatives ! »

« Aussi, à l’occasion de la Journée nationale des peuples autochtones, le 21 juin, nous hisserons le drapeau anichinabé pour reconnaitre que nous sommes installés sur leur territoire non cédé », explique Carolyn. « Nous soulignerons aussi à nouveau la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, le 30 septembre prochain. Je vous invite toutes et tous à participer à ces événements. »

« On souhaite aussi augmenter la visibilité des personnes et symboles autochtones à Montfort », ajoute Carolyn. « Les œuvres d’art qui sont installées au Centre familial de naissance, au Carrefour santé Aline-Chrétien, et bientôt à l’entrée principale de l’hôpital, en sont des exemples. »

Comment le colonialisme se manifeste-t-il encore aujourd’hui ? 

« C’est définitivement important de noter que nous vivons tous, peu importe notre culture, identité ou ethnie, sous les structures et coutumes coloniales », précise d’emblée Carolyn. « Ceci inclut, parmi beaucoup d’autres exemples, les notions de hiérarchie, d’institutions, de gouvernement et de nos langues officielles. »

« N’oublions pas qu’il y avait des dizaines, sinon centaines, de langues autochtones parlées au Canada avant l’arrivée des Européens. L’Organisation des Nations Unies a déclaré 2022-2032 la Décennie internationale des langues autochtones. »

« Spécifiquement pour les peuples autochtones, quelques exemples de formes modernes de la colonisation incluent les éléments suivants », explique Carolyn.

  • Expropriation des territoires : nous continuons de voir des projets de pipelines et d’exploitation minière sur les territoires autochtones sans leur consentement, ou sans consentement libre et éclairé, des communautés impliquées.
  • Services sociaux et de santé inadéquats : les services qui sont offerts dans les réserves demeurent souvent sous-financés par rapport à ceux à l’extérieur des communautés autochtones. Ceci peut contribuer à des effets néfastes sur leur santé et mieux-être et à accentuer les obstacles à l’accès aux services essentiels. Ces iniquités forcent souvent des personnes autochtones à quitter leur communauté pour avoir accès aux services dont elles ont besoin, mais qui ne sont pas nécessairement culturellement adaptés ou appropriés.
  • Femmes et filles autochtones disproportionnellement victimes de violence et de sexualisation : ceci comprend des disparitions et des meurtres, comme documenté par l’enquête nationale sur les femmes et filles autochtones disparues et assassinées (FFADA). La réponse des différents paliers de gouvernement demeure lente et inadéquate par rapport à l’implantation des recommandations du rapport FFADA. Consultez le sommaire du rapport final de l’enquête nationale à ce sujet.

« Malheureusement, il y a beaucoup d’autres exemples incluant la “Loi sur les Indiens”, le manque de respect de la gouvernance et de l’autodétermination des peuples autochtones, la surreprésentation dans le système correctionnel, etc. », ajoute Carolyn.

« La santé des peuples autochtones est une question complexe et multidimensionnelle qui nécessite une approche holistique et respectueuse de leurs cultures et de leurs droits », conclut Carolyn. « Les disparités persistantes en matière de santé entre les populations autochtones et non autochtones sont inacceptables. Je tiens à réitérer l’engagement de Montfort à travailler de concert avec les communautés autochtones pour améliorer leur santé et leur bien-être. »

Martin Sauvé
Martin est directeur des communications, et fait partie de l'équipe Montfort depuis 2014. Quand il n'est pas en train d'écrire pour le Journal Montfort, il est surement en train d'arroser ses nombreuses plantes, ou d'explorer un quartier branché de la ville – ici ou ailleurs...