Véronique Papineau est infirmière depuis 23 ans. Elle fait partie de l’équipe des Soins intensifs de Montfort depuis 2004. Plusieurs la connaissent pour son implication dans la cause du don d’organe, ou encore comme membre de l’équipe ÉRIC.
Toute petite, Véronique aime aider les gens. Ses parents l’appelaient « la sauveuse ». Après avoir pensé devenir vétérinaire, elle se tourne plutôt vers la profession d’infirmière : « J’ai cherché le côté humain, » dit-elle. « Quand j’ai commencé, j’ai tout de suite su que c’est ce que je voulais faire. C’est vraiment ma vocation. »
« Même depuis tant d’années au chevet, je ne me verrais pas ailleurs. »
Arrive un changement, cet hiver. Un nouveau virus, un peu mystérieux, mais dont on ne s’inquiète pas trop au départ. « Quand tout ça a commencé, on voyait la Chine, l’Europe… on nous disait que ça allait venir, » raconte Véronique. « … mais tant que c’est pas rendu, on ne le croit pas vraiment. »
Ça s’est rendu. La suite, on la connait. De par son rôle aux Soins intensifs, Véronique était aux premières loges de cette pandémie. « Beaucoup de choses changeaient rapidement, » dit-elle. « L’hôpital a fait un travail extraordinaire. » Des employés redéployés, du travail d’équipe beau à voir. Les semaines passent, les patients vont et viennent. On réinvente même nos façons de faire.
Pourquoi je vous parle de Véronique ? Parce qu’elle m’a demandé de vous raconter son histoire.
Un jour, l’impensable : « J’ai développé des symptômes. »
Vous l’aurez compris, Véronique a contracté le coronavirus. Elle a eu la COVID-19. « Quand j’ai eu le résultat, c’est comme si je ne le croyais pas », explique-t-elle. « C’était un choc. »
Ce jour-là, il n’y avait qu’un nouveau cas dans la région : « C’était moi. »
Les jours qui ont suivi ont été parsemés d’inconnu. « On ne sait pas comment les journées vont aller, c’est comme une surprise », raconte Véronique. « T’espère que tu ne seras pas trop malade, mais tous les jours il y a de nouveaux symptômes… »
« Ce n’est définitivement pas juste une grippe. »
Avec le diagnostic vient une série de consignes, mais il y en a une qui prend vite le dessus : l’isolement. C’est en partie pour ça que Véronique tient à partager son histoire : parce qu’il faut en parler. « Oui, il y a les symptômes physiques, mais c’est dur psychologiquement aussi », explique-t-elle. « Déjà que le confinement, c’est difficile pour tout le monde… j’ai vécu en isolement presque un mois. Je ne voulais pas laisser la peur prendre le dessus. »
Une journée à la fois. C’est le mantra que s’est donné la mère de famille pour tenir bon. « Ça a été très difficile de lâcher prise. Ça a été un combat entre la tête et le corps. » Ce combat, il a aussi été difficile pour sa famille, son conjoint (qui travaille aussi à Montfort) et son fils de 5 ans.
« Il y a des soirs, avant le dodo, il me disait : “Maman, j’ai de la peine. Moi je voulais pas que tu sois malade, je voulais pas que tu aies la COVID.” Ça vient nous chercher… » raconte-t-elle. « Il me demandait souvent quand la COVID allait partir. »
« 29 jours d’isolation avec un enfant, c’est pas toujours facile… mais ils ont une force ces enfants ! Alors j’ai pensé t’envoyer une photo au naturel dans mon salon avec mon fils. »
« Maman est guérie ! Ensemble, on a battu la COVID. »
« Finalement, j’ai bien répondu au traitement pour la pneumonie et je me suis mise à mieux aller. » Véronique ajoute que cette période lui a permis d’en apprendre beaucoup sur elle-même. « J’ai toujours pris soin des autres ; là c’était à mon tour. Ça a été une expérience de vie ». C’est cette expérience qu’elle désire maintenant mettre à profit, pour aider les autres.
Un désir de redonner, qui vient en partie du fait que l’entourage de Véronique a été incroyablement généreux pendant qu’elle combattait la maladie. De ses proches à ses collègues, elle a senti l’appui des gens — des messages, des plats cuisinés, des conversations réconfortantes… « C’est extraordinaire ici, à Montfort. Les gens sont solidaires, s’entraident », dit-elle. « C’est pour ça que j’ai choisi de venir travailler ici, et que je suis encore là. »
Bien qu’elle n’ait que des louanges pour son équipe des Soins intensifs, pour les infirmières du bureau de santé et sécurité, et pour les gens de la santé publique, Véronique sent qu’il manque un morceau au casse-tête : « Ce qui m’a manqué le plus, c’est de parler à quelqu’un de malade comme moi, dans la même situation que moi. »
« Il y a comme un tabou… je veux briser ce silence-là. »
Véronique est revenue au travail depuis quelques jours. Elle prête main-forte à l’équipe du flot, temporairement — équipe pour laquelle est n’a que de bons mots.
Avec le déconfinement qui se poursuit, on ne peut qu’être d’accord avec notre collègue : « Il faut rester prudent ! » Comme elle l’explique, « ce virus-là est vraiment sournois ». C’est pourquoi elle insiste : « Il faut absolument se protéger, au travail comme dans nos vies au quotidien… distance sociale, masque, hygiène des mains. »
« C’est notre réalité, ça peut arriver à n’importe qui. »