Cette chronique de Denis Gratton, mettant en vedette le chef de la direction de l’Institut du Savoir Montfort, est parue dans le journal LeDroit du 27 avril 2018.
Il était plus du monde des arts. Le théâtre, le chant et la danse l’interpellaient. L’architecture, surtout. Et de devenir architecte était son rêve d’enfance. Puis il est devenu médecin…
Aujourd’hui, à l’âge de 57 ans et après une longue carrière comme médecin de famille et professeur de médecine à l’Université Laval à Québec, sa ville natale, le Dr André Bilodeau dirige l’Institut du Savoir Montfort, à l’Hôpital Montfort, en plus d’enseigner la médecine à l’Université d’Ottawa.
« Je suis allé en médecine par obéissance, lance-t-il dans un éclat de rire. J’ai été pensionnaire chez les Frères capucins, à Québec, de l’âge de 17 à 24 ans. Et à l’époque, mon grand rêve était de devenir architecte. Mais finalement, le Supérieur provincial des Capucins m’a dit : ‘On n’a rien à faire avec un frère architecte. On ne construit plus rien, on vend. T’as de bonnes notes, tu vas aller en médecine’. Alors j’ai appliqué en médecine à l’Université Laval et j’ai été accepté. Et c’est comme ça que je suis devenu médecin. Par obéissance. »
Mais André Bilodeau en voulait plus. Étudier la médecine n’était pas assez pour lui.
« À ma dernière année d’études, raconte-t-il, j’étais encore dans la communauté (des Frères capucins), je faisais des stages cliniques à l’hôpital et je m’ennuyais. Je trouvais que ça ne m’occupait pas beaucoup. J’ai donc commencé une maîtrise en théologie.
— Pourquoi la théologie ?
«Parce qu’il y en avait pas mal autour de moi, des théologiens !, répond-il en riant.
«Je ne voulais pas devenir prêtre, ça, c’était clair, reprend-il plus sérieusement. Donc c’était plus pour l’aspect intellectuel que pour l’aspect foi.»
— Mais doit-on conclure que, comme médecin, vous croyez à la vie après la mort ?
«Je vais vous donner la même réponse que m’a donnée un prof en théologie à cette question. Je crois qu’il y a des moments dans notre vie où on se sent tellement bien, tellement en accord avec les gens autour de nous et avec nos valeurs, qu’on a l’impression d’être dans un moment d’éternité. Qu’on pourrait mourir là et qu’on serait heureux. L’éternité, ce sont ces moments-là que t’as investis dans ta vie. C’est-à-dire que c’est ma décision, c’est mon choix de faire les choses qui sont bonnes, qui sont bien et qui ont de la valeur, qui font en sorte que je suis en train de construire ma portion de l’éternité à moi, en dehors de l’idée d’un jugement dernier. Quand on fait le bien, on crée notre éternité.
« Donc est-ce que je crois ? Je pense qu’il y a une vie en dehors du concret, mais qu’elle n’est pas après, ou avant, ou au-dessus. Elle est ancrée dans l’expérience humaine. Comme médecin de famille, je peux voir quelques centaines de personnes dans une semaine, et quelques milliers dans une années, mais les besoins sont immenses et infinis. »
« C’est la raison pour laquelle je suis allé dans l’enseignement, dans la transmission. »
Dr André Bilodeau
« Parce que je me suis dit que la meilleure manière de faire en sorte qu’il y ait plus de gens qui puissent avoir des soins de qualité, c’est de former des dizaines et des dizaines de futurs médecins de famille. L’essentiel de ma vie a été de former la relève. Et encore aujourd’hui, je suis professeur à l’Université d’Ottawa parce que je pense que c’est la meilleure façon de laisser ma marque. Et ça revient à la question : est-ce que je crois dans la vie après la mort ? L’important, c’est de laisser une marque. »
Malgré ses nombreuses années en médecine familiale et sa carrière fort impressionnante dans le domaine de la santé — il a notamment créé le premier institut de recherche en français de l’Ontario dans le domaine de la santé — le Dr Bilodeau a toujours conservé son amour pour les arts. «Je suis plus un homme des arts qu’un homme des sciences», affirme-t-il.
Il a joué dans plusieurs spectacles pièces de théâtre au fil des ans. Il a été collaborateur pendant quelques années à l’émission Sexe et confidence diffusée au canal V. «J’étais le médecin invité chaque semaine», se souvient-il. Et il anime annuellement le Gala du Mérite pour les employés de l’Hôpital Montfort, dans lequel il joue, il danse et il chante, au grand plaisir de ses collègues qui lui découvrent un autre visage que celui d’un chef de direction.
Puis il y a l’architecture. Son rêve d’enfance. Il n’a jamais eu la chance d’étudier dans le domaine, mais il a beaucoup lu sur le sujet. Tellement lu que…
«Je me suis amusé tout récemment, dit-il. J’ai dessiné les plans de ma maison et je viens de la faire construire à l’est d’Ottawa. J’ai présenté mes plans à la compagnie qui l’a construite. Ils ont envoyé ça à leur architecte et à leur ingénieur. Et tous deux ont dit qu’ils n’avaient absolument rien à changer. Mes plans étaient parfaits», conclut-il fièrement.