Judith Boileau : réflexion sur 37 ans de carrière à Montfort

1918

par Judith Boileau

Reconnaissez-vous Judith?

D’un point de vue historique personnel, débutons par ma naissance à Montfort. Notre médecin de famille était Dre Annie Powers, une des pionnières de Montfort. À l’âge de 5 ans, j’ai été patiente en pédiatrie pour qu’on m’enlève mes amygdales avant de commencer l’école.  Ceci était une routine à l’époque….

D’un point de vue professionnel…

Après avoir été étudiante infirmière pendant 3 ans, j’ai obtenu un poste à temps partiel à l’Hôpital St-Vincent comme « aide infirmière », le premier été et les fins de semaine; comme aide infirmière la deuxième année où on ajoutait des tâches, et la troisième année comme infirmière autorisée.  On devait signer un contrat de 3 ans et continuer au moins 6 mois après la graduation avant de partir.

Judith Boileau, jeune infirmière diplômée

J’ai fait tous mes stages à L’Hôpital d’Ottawa, sauf pour mon stage en consolidation en orthopédie avec Jean Nielsen comme mentor!  La crème de la crème…

Je savais que je ne voulais pas travailler à L’Hôpital d’Ottawa, car je voulais travailler dans ma langue qui est le français.  Ceci a toujours fait partie de mes choix de carrière même si je suis complètement bilingue.  Bénévole et militante pour la cause francophone, j’ai fait partie pendant plusieurs années au conseil d’administration du Groupe des infirmiers et infirmières francophones de l’Ontario (GIIFO) afin d’obtenir notre licence de pratique en français, ce qu’on a obtenu, ainsi que des services dans notre langue, entre autres.

J’ai été embauchée en 1984, quand les emplois en soins infirmiers étaient très rares. Les gens devaient s’expatrier car il y avait trop d’infirmières.  J’ai obtenu un poste à temps partiel en médecine.

Au début 1985, j’ai obtenu un poste à temps complet, de nuit en orthopédie.  Dans ces années-là, la rotation n’existait pas. Ceci est venu, par la suite quand nous avons demandé d’avoir une rotation jour/soir ou jour/nuit.

Lorsque Bob Ray, premier ministre de l’Ontario, a fait une restructuration dans les hôpitaux, les mises à pied sont arrivées et ont chambardé la vie de plusieurs employés à Montfort.  Moi, j’ai été affectée dans le 2e « bumping », ce qui veut dire que je prenais le poste d’une infirmière moins sénior que moi, selon les spécifications du poste.  J’avais prévu le coup en prenant mon cours des soins coronariens.  J’ai donc pu accéder à la salle d’urgence en promettant de faire ma spécialisation en soins d’urgence.   Cette période n’a pas été facile à vivre, on prenait la place d’une personne de la gang et on était « l’intrus ».  Quand on parle de chambardement, ce fut tout un chapitre.  Même si je suis une personne forte avec de la confiance en moi, la vie nous apporte des épreuves qu’on ne peut prévoir. 

Étant curieuse et voulant toujours apprendre, j’ai fait mon baccalauréat en cours du soir, en travaillant à temps complet de nuit.  Dans ces années-là, le bacc de base n’existait pas et nous étions toutes des infirmières d’expériences qui faisaient un bacc de perfectionnement.  Aucun cours ne pouvait être reconnu à l’époque.   

Une fois confortable à l’urgence, un endroit où j’ai beaucoup appris et que j’ai apprécié, me voilà curieuse pour un nouveau défi.  Je postule sur un poste qui à l’époque s’appelait « clinicienne », et qui est l’éducatrice clinique d’aujourd’hui. 

Je suis devenue la troisième clinicienne dans l’hôpital. Mes collègues étaient Giselaine Boucher (médecine) et Judith Gigoux (soins critiques); moi j’étais en chirurgie au sens large.  J’étais entre bonnes mains.  Afin de pouvoir bien entreprendre ce nouveau défi, je m’inscris à l’université avec ma collègue Giselaine pour faire un degré d’étude supérieure en andragogie (éducation des adultes). 

La pratique professionnelle veut dire ce titre : « tout ce qui est en rapport avec la profession des professionnelles ».  J’ai appris, enseigné, transféré mes connaissances, et j’en passe.  Ceci n’existait pas comme entité à Montfort auparavant.

Par exemple,

  • Comment inventorier tout ce qui existe pour la documentation en vue d’informatiser dans MEDITECH.  Un projet d’envergure, où Thérèse Antoun est arrivée.
  • Le « Central intake pour Arthroplastie hanche et genou », programme développé en collaboration régionale que nous avons mis sur pied à Montfort.
  • Le volet oncologie a aussi pris beaucoup de place afin de mettre les pratiques uniformes au niveau de la région.  On est parti de rencontre silencieuse à des belles complicités entre hôpitaux et du réseautage pour nous donner les cheminements cliniques et les lignes directrices.
  • Un autre rôle où on a travaillé fort pour son acceptation et sa mise en place, c’est le titre d’infirmière en sigmoïdoscopie. Trois infirmières ont été certifiées.
  • Pour être un organisme vedette en pratiques exemplaires (OVPE), une des trois meilleures pratiques qu’on a travaillé et mis en place, c’est la prévention de la constipation.  Un sujet pas trop sexy, mais tellement important !

J’ai aussi fait des contrats en enseignement à l’Université du Québec en Outaouais, à La Cité collégiale et à l’Université d’Ottawa pour des infirmières et des étudiants en médecine.

La dernière tranche de vie pour mon chapitre de 37 ans, c’est le rôle de conseillère en projets spéciaux, télémédecine et éthique clinique.

Judith a été la pionnière de la télémédecine à Montfort

L’éthique clinique m’a été transférée par ma directrice de l’époque; ma curiosité l’a emporté, j’ai pris un cours et je me suis formée afin d’en apprendre davantage.  Ce portfolio a été très humain et instructif; il nécessite d’être à l’écoute des autres, de prendre un recul et d’écouter.  Lors des formations académiques, ceci est proposé tellement différent que dans la vraie vie.   

La télémédecine, que dire!  Ceci fait partie de nos objectifs stratégiques depuis les derniers cinq ans.  Au début, même si j’avais déjà travaillé en partie dans ce dossier par le passé, ce n’était pas évident.  « Pourquoi on a besoin de ceci?  Ça prend plus de temps qu’en personne? »  Avant la COVID, des recherches rapportaient que les patients demandaient déjà d’avoir leurs soins en virtuelle, par vidéo, mais ceci n’était pas accessible ou disponible.  Pourquoi?  Plusieurs raisons sont possibles.  Un des premiers départements à Montfort qui a emboité le pas a été l’hématologie, avec Dre Linda Lacroix. 

Que réserve l’avenir?

Le futur « post Hôpital Montfort » sera concentré sur le chalet, en nature, à faire des randonnées en montagne, et post-COVID à faire des voyages, passer du temps avec la famille et les amis. 

Merci pour cette belle aventure avec la famille Montfort…

Judith